- Sais-tu pourquoi tu es ici ?
- "Oui, maman m'a expliqué."
- Oui..et ?
-" J'ai un problème ...à la maison."
- Bien, ici tu peux tout dire, il n'y a pas de jugement, c'est un endroit qui aidera tes parents et toi-même à te comprendre. Tu n'es ni à l'école ni devant tes copains ou copines, ni devant un juge. L'objectif est que nous comprenions tous ensemble ce qui t'arrive.
Maman m'a téléphoné il y a quelques jours. Peux-tu me dire, toi, de la manière dont tu veux me raconter ce qui s'est passé.
Après quelques moments d'hésitations, l'enfant répond..
- "Oui"
Silence, l'enfant se tortille dans son fauteuil, le regard fuyant. Il est mal à l'aise. Ses doigts se touchent, ses pieds bougent. Je perçois qu'il est en train d'avoir une dissonance à l'intérieur de lui-même. Il a envie de parler mais il n'ose pas.Il a appris que ce qui se passe est un phénomène de honte parce qu'il ne le comprend pas et que son environnement, les autres, adultes non plus. Quelque chose d' anormal s'est produit provoquant une souffrance concrétisée par un sentiment de honte. Il finit par répondre.
-" Je fais pipi dans mon lit".
- Tu l'as toujours fait ?
-" Non...cela m'arrive seulement depuis quelque temps"
- Bien...toute les nuits ?
-"Non" s'exclame t-il..."Juste de temps en temps".
L'enfant continue à se tortiller un peu les doigts, le regard un peu fuyant..
- Que ressens-tu en ce moment à l'intérieur de toi?
Hésitant, il répondit.
- "heu, j'ai un peu honte..un peu beaucoup mais je ne sais pas pourquoi cela m'arrive"
- Tout d'abord tu n'as pas à avoir honte. Ce qui t'arrive est indépendant de ta volonté.
Tu t'appelles comment ?
- "Gaston"
- Tu as quel âge ?
-"9 ans"
- Bien, Si tu as ce sentiment de honte c'est bien parce que tu ne comprends pas ce qui se passe. Tu assimiles ton état par rapport à ceux des autres car si tous les enfants de ton âge faisaient pipi au lit, tu n'aurais pas ce sentiment de honte. En dehors de cela, tu ne fais plus pipi au lit mais tu le refais de temps en temps en comprenant que quelque chose malgré toi se produit, quelque chose que tu ne maîtrises pas.On va donc chercher à comprendre pourquoi tu fais pipi au lit, quelque chose peut-être que tu sais mais que tu ne sais pas que tu sais car tu ne fais pas le lien.
Comment se passe l'école? Avec ta maîtresse, tes copains, tes copines ?
-"J'aime bien ma maîtresse, elle est gentille. Oui j'ai plein de copains."
- Bien..tu as de très bons copains?
-"Oui j'en ai 2..."
- Vous jouez à quoi ensemble ?
- "on joue au foot, au jeux vidéos"
- C'est sympa, aux jeux vidéos, lesquels ?
- "Oui, le jeux...."
- Tu y vois quoi dans ce jeu ?
-" c'est super mais cela me fait un peu peur...il y a des monstres..vampires.."
- Tu dis c'est super...mais tu en as peur. Pourquoi c'est super ? Pourquoi y joues-tu ?
- J'aime bien jouer avec mes copains. Je les aime bien, on joue toujours ensemble, à la récréation et on se voit chez nos parents, en dehors de l'école...Et puis un jour Théo m'a montré ce jeu...il m' a montré ce jeu vidéo, il a trouvé ce jeu super, il me faisait peur mais il voulait absolument qu'on y joue, Martin aussi d'ailleurs, alors j'ai joué aussi".
- Tu y joues où ?
-" Quand on va chez lui, une fois par semaine à peu près."
-" Que disent ses parents ?
-" Ils sont très gentils. Ils ne disent rien par rapport aux jeux vidéos. Ce n'est qu'un jeu pas la réalité. Et puis mes copains n'ont pas peur, eux."
- Oui, tu en es sûr ? Est ce que tu leurs à dit que tu avais peur ?
-" Non"
- ...Alors pourquoi, eux, te diraient qu'ils ont peur. Le savent-ils réellement ? Est ce bien de ne pas avoir peur ?Pas sûr... Tu joues depuis combien de temps ?
-"depuis le début de l'année"
-Tu as peur quand tu joues à ce jeux mais tu as peur quand aussi ?
- "J'ai peur dans ma maison."
- Tu as peur dans ta maison ? Quand ? Où ?
- "Oh oui, quand je monte les escaliers, je ferme les yeux ou je cours pour aller chercher un objet dans ma chambre et revenir en bas près de maman. J'ai peur de monter seul à l'étage."
- Dans le noir, quand la lumière est allumée ?
-"Les 2, quand il y a personne, ni papa, ni maman. Mais dans le noir, c'est pire. J'ai très très peur."
- Tu as peur de quoi ?
- "Qu'il m'arrive quelque chose...mais je ne sais pas exactement quoi."
- Oui, tu peux me dire.
-" C'est bête, je n'ose pas trop. J'ai peur des fantômes ou des vampires, des vampires..je sais que cela n'existe pas mais j'ai peur."
- Bien, pourquoi tu dis que cela n'existe pas ?
- "Maman et papa m'ont dit que cela n'existait pas."
- "Oui mais ?"
Silence...
- Qu'est ce qui t'a parlé de ces fantômes, en as-tu-vu ?
-"Pour de vrai, non mais avec mon ami, je regarde aussi des fois des films qui font peur..avec des fantômes ou des vampires."
- Pourquoi tu les regardes ?
- "En fait, il m'a demandé si j'avais peur de regarder ce genre de film. J'en avais déjà vu un. J'ai eu peur. Mais là, il m'a dit que si je ne regardais pas, j'étais une mauviette. Alors j'ai regardé."
- Sais-tu comment fonctionne la peur ?
-" Non"
Par exemple, ton inconscient enregistre la peur, dès que tu te retrouveras dans une situation identique, un silence, seul, le calme, le noir peut provoquer chez toi un sentiment d'inquiétude, d'anxiété puis de peur. Ces ambiances, ces atmosphères, tu les a découvertes lors de ce fameux jeu et ces films qui ne sont pas appropriés à ce que tu es, en ce moment et peut-être même plus tard...tu ne peux les expliquer..
- Malgré mon vieil âge, sais-tu combien de films d'horreur j'ai vu ? Un seul et j'ai compris que cela n'était pas pour moi. L'avantage, c'est que je peux me promener dans la forêt seul, dans le noir, me lever chez moi dans le noir sans que mon esprit développe un imaginaire involontaire, provoqué par mon inconscient. Tu as peur du noir ?
- "Oui !"
- Sais-tu pourquoi tu as peur du noir ?
-"Non"
- Tu as peur d'être surpris, que quelque chose survienne avant que ton cerveau ne le comprenne. Si ton cerveau ne comprend pas l'action qui se produit devant lui, il se protège en ayant peur car il ne peut y faire face. C'est tout à fait normal de réagir de cette façon. C'est que ton cerveau fonctionne bien. Le noir, avec ce que tu as vu avec tes copains, les scènes se déourent dans la pénombre ou dans le noirs certaines fois ? Il n'y a personne, le personnage est dans le silence, le calme, il est seul dans une pièce ?
-"Oui"
- Et quand tu as envie de faire pipi la nuit, tu fais comment ?
- "Cela m'arrive des fois...j'attends...le matin.."
- Donc si ta envie d'aller faire pipi, c'est que ton corps a besoin de le faire à ce moment là mais que tu ne le fais pas car tu as trop peur d'affronter le noir c'est cela ? Tu sais que si ta vessie est trop pleine, c'est extrêmement dur de se retenir ?
- "des fois j'y arrive...des fois quand je me réveille je suis tout mouillé."
- Décris-moi une scène où tu as peur.
-"le héros avance pas à pas dans la pièce, il entend un bruit, surpris, il se retourne, il ne voit rien, avance encore, doucement, il passe le pas de la porte quand une chose surgit sur lui, un vampire"
- la peur dans ce cas précis se déclenche par le metteur en scène qui est provoqué par l'intervention de l'événement qui apparaît plus vite que le cerveau peut comprendre ce qu'il se passe. Ici, en l'occurrence, l'œil transmet l'information au cerveau mais l'action est tellement rapide qu' un moment de panique apparaît et se désamorce quand l'information a été transmise, pouvant même provoquer une accélération momentanée de votre cœur. Le metteur en scène utilise souvent des formes floues ou la déformations de certains traits du personnage afin d'accentuer l'incompréhension du cerveau à comprendre ce qui se passe, de sortir de la norme vécue ou apprise pour retarder la compréhension de ce qui se passe par un effet de surprise, de panique. On ne comprend pas ce qui se passe, ce qui provoque la peur puis l'angoisse si la vue de ces scènes se répète régulièrement.
Dans ce cas précis, on observe que le faites que Gaston face pipi dans son lit de temps en temps après un arrêt de plusieurs années n'a rien à voir à un retour en arrière ou une quelconque situation compliquée au sein de sa propre famille mais simplement au faîtes que son esprit soit confronté à des éléments comme ce jeux vidéo et certains films de façon régulière développant son imagination et un début d'angoisse au sein même de sa propre nuit et de son propre lit surtout la nuit, l'empêchant de se lever naturellement la nuit lorsqu'il en a besoin comme celui de faire simplement pipi. Il a honte d'en parler à ses parents car ce serait perdre la face avec ses meilleurs copains donc il garde cela au fond de lui car ses copains, eux, ne font pas pipi au lit la nuit. Oui, en effet, ce jeune garçon a peut-être raison, peut-être que ses copains n'ont pas peur en se confrontant à ces jeux vidéos et films mais ce qu'il ne sait pas c'est que ces camarades développent certaines problématiques à leurs dépends, chose dont ils n'ont pas encore conscience. Une question se pose..;est-il conseillé de se confronter à la peur ou à la violence et ne pas avoir ce sentiment qui devrait se déclencher selon nos normes sociétales sous prétexte que ce n'est pas réel ? L'enfant est-il capable de différencier réel et imaginaire dans la partie inconsciente de son esprit ? Le degré de violence et de peur à une acceptation plus ou moins élevée selon la nature de ce que l'on voit et l'âge où on vit la scène car la part d'imagination inconsciente n'est pas contrôlée par la partie consciente de l'esprit, elle ne peut l'être d'ailleurs.