Angoisse, parcours et cheminement

Le stress intervient chez autrui tel une réaction à la suite d'une action, d'un événement.

Enfant, on reçoit ce genre de phénomène par l'interaction avec l'autre ou aussi par la découverte et l'apprentissage du danger. Il est perçu consciemment et inconsciemment. C'est la partie inconsciente qui va ici m'intéresser par sa représentation dans l'individu.

La cloche ou la sonnerie de l'école sonne, les enfants se dépêchent de rentrer, de se mettre en rang avant de rentrer en classe. C'est une action qui amène une réaction de l'enfant, un petit stress, ou son corps, son émotion s'interrompt soudainement alors qu'il était entrain de jouer dans la cour de récréation par exemple. C'est une sentiment qui n'est pas forcément agréable à ressentir, interrompu dans une activité désirée mais cela fait partie de son apprentissage et de son conditionnement. Les conséquences sont alors anodines.


Là où le stress commence à se confondre et s'assimiler à l'angoisse c'est lorsqu'elle surprend, elle n'est pas comprise dans l'apprentissage, elle est indépendante où elle se développe accompagnée d'un sentiment de malaise, une situation incomprise, à notre insu. 

Un petit enfant rentre de l'école, content de retrouver sa maman. Il fait ses devoirs, mange avec ses frères et sœurs. L'aiguille de l'horloge avance peu à peu. Le père de famille ne va pas tarder à rentrer. La maman devient peu à peu, de plus en plus nerveuse, un événement va survenir, le papa ne va pas tarder à rentrer du travail. Une cassure va survenir. La maman va se cristalliser, l'enfant perçoit le changement grandissant de sa mère. Il observe, sans comprendre ce qu'il perçoit, il ressent des sensations négatives sans pouvoir en prendre conscience. Un profond malaise s'installe à l'extérieur de lui pour se projeter à l'intérieur de lui. C'est le début de l'angoisse, un sentiment qu'il ne saurait définir, étant trop immature dans la conscience de sa perception et de son raisonnement.18h30 ! L'horloge sonne, d'un coup strident, percutant, annonçant la venue du père de famille. Les secondes sont interminables. Un silence hors du temps s'installe, chacune des personnes prenant position dans la maison puis enfin on entendit le bruit lointain se rapprochant peu à peu pour tout d'un coup, rompre cet instant indéfinissable par le bruit des clés s'infiltrant dans la serrure; la porte de la maison s'ouvre pour laisser place à un monsieur, tenue impeccable, le regard sombre, glacial et distant. L'espace, le temps se fige dans l'infini de cet instant. A l'intérieur de cet enfant, le malaise s'installe de plus en plus profondément pour envahir peu à peu toutes les pièces. Son papa rentre dans la maison, glacial, froid, fatigué, nerveux, angoissé puis cherche à s'approcher de la mère, sa femme, elle aussi glaciale, mal à l'aise, anxieuse, presque paralysée. L'enfant est là, impassible, ne se sent pas du tout à sa place peut-être, de trop, il est content de voir son papa mais en même temps il redoute sans savoir pourquoi la situation. Il assiste mal à l'aise, impuissant, il aimerait être ailleurs ou peut-être là où il est mais différemment. Il éponge l'angoisse grandissante et présente de ses parents et s'en approprie avec son propre ressenti, son histoire qu'il n'a pas choisi. Cette sensation quand elle a lieu une fois a très peu d'impact et finit même par disparaître ou anodine si elle a lieu rarement. Dans ce cas précis, l'enfant reçoit cette émotion à travers son quotidien. Il s'en approprie malgré lui dans un fonctionnement psychique où il ne connaît pas son fonctionnement interne, ces sensations vont être refoulées et ressurgissent pour voyager à travers le temps et former peu à peu un phénomène d'angoisse de plus en plus oppressant, sans qu'il sache comment et pourquoi, à quel moment cela arrive, une sensation déclenchée par des évènements divers, sans relation pourtant apparente, déployée par des évènements déclencheurs provoquant une réaction psychique involontaire entre son conscient et son inconscience sans en avoir conscience. D'autres émotions certainement en découlent mais là, nous nous intéresserons seulement à l'angoisse, sa genèse, sa construction, son cheminement.

Un adolescent ou une adolescente ayant reçu l'angoisse dans son environnement familial, scolaire durant son enfance en prend possession, inconsciemment. Pourquoi  ne la rejette-il pas ? 

Parce qu'il ne la reçoit d'abord que innocemment et pas par n'importe qui, ses proches, les gens qu'il aime, reconnaît comme son ou ses "caregiver". Ces personnes d'ailleurs dans la plupart des cas aiment aussi cet être. Petit, il ressentait simplement un malaise puis un mal-être lorsqu'il se retrouvait confronté à cette émotion ou dans un événement provoquant cette sensation. Durant son adolescence, il peut d'ailleurs, durant cette période, tenter de s'en débarrasser à travers un désir d'indépendance, une révolte, une prise de position plus extrême que la norme reçue durant son éducation. L'adrénaline, qui peut s'associer à la formation d'un stress positif peut même prendre forme. Il est sûr d'avancer, de s'émanciper et il le fait d'une certaine manière pour parvenir à une réelle émancipation mais souvent éphémère car la problématique se situe dans la construction de l'être en profondeur.


Devenue jeune adulte, cette personne quitte le domicile de ses parents. Elle a vécu dans son enfance et son milieu intra-familiale une relation angoissante avec ses proches. Elle pense donc la fuir en partant. Ce qu'elle ignore, c'est qu'elle part avec elle, en l'emportant avec elle, inconsciemment, l'angoisse reste accrochée, elle fait partie maintenant intégrante de sa personnalité. 

Pour s'en défaire, il faut pouvoir la voir, consciemment, l'identifier, percevoir ses déclencheurs et réagir aussitôt, la prendre en compte, ce qui la rattache du présent à son passé, ne pas la renier. La somme de tous les refoulements associés à l'angoisse peut constituer une crise de panique dans le temps, ce qu'on appelle une crise d'angoisse. Elle apparaît avec surprise, sans prévenir, on ne la reconnaît pas, elle s'est construite à notre insue car on l'a reniée, refoulée, enfouie profondément. Elle ressurgit, tel un volcan, explosif, incontrôlable, impardonnable tel un signal fort du corps

Dans un premier temps, pendant la crise, il faut parer à l'urgence; la prise d'un anxiolytique prescrit par un médecin est souhaitable lors d'un crise extrêmement intense afin de calmer et canaliser le sujet. En parallèle, le réconfort, la parole, le toucher par la main ou le bras d'un proche ou d'une personne à qui l'on fait confiance est conseillé et préconisé. Un gant bien frais posé sur le front de la personne angoissée est le bienvenu. Parler calmement, sans évoquer l'angoisse, simplement, sans panique, amener le sujet à se recentrer sur lui-même, par des éléments vérifiables comme sa respiration, ressentir chaque partie de corps, ect... 

Puis plus tard, lorsque la crise est redescendue, il faut pouvoir l'étudier, la mettre à plat, l'observer, chercher à la comprendre, ce qui se cache derrière, ses associations d'idées et de pensées. Sans choc traumatique, il y a toujours une étape d'angoisse avant la venue d'une crise d'angoisse. Elle ne se chevauche pas tout le temps. Plusieurs situations angoissantes peuvent avoir lieu pour le sujet pour finalement par exemple déclencher une crise d'angoisse à un moment ultérieur durant le sommeil du sujet. 


Revenons à cette jeune adulte. Se sentant oppressée, elle n' a qu'un désir, se libérer de cette oppression. Elle ne la supporte plus. Elle va partir du domicile parental et commencer à vivre différemment. Son style de vie va se détacher dans un premier temps totalement de ce qu'elle a appris, aussi bien moralement que dans le ressenti. Elle va apprendre la liberté et exploser cette angoisse oppressante qui l'habite en permanence. Elle n'en veut plus, la liberté et l'extérieur l'attirent tel un aimant, une volonté qu'elle ne peut contrôler. Peu à peu, à travers le temps, sa vie redevenant routinière, elle ressent une insatisfaction réapparaître, un sentiment de malaise ressurgir, comme si l'air lui manquait peu à peu, qui a du mal à pénétrer à l'intérieur de ses poumons. Cette liberté, elle la perçoit de moins en moins, elle travaille, s'est mariée et a eu un enfant. Tout va pour le mieux en surface, d'un point de vue extérieur. Et pourtant, elle ne parvient pas à l'expliquer, elle voit et ressent les choses de plus en plus négativement, malgré elle. Elle a mal mais ne sait pas pourquoi. Elle devient de plus en plus désagréable et reproduit malgré elle le schéma familial auprès de celui ou celle qui partage sa vie et celle de son enfant. L'angoisse est là, bien présente, omniprésente, non seulement maintenant à l'extérieur mais aussi à l'intérieur. Elle la ressent mais sans la percevoir véritablement.

A la suite de la séparation parentale, l'adulte avait ressenti un élan de libération véritable, insouciant, authentique, se sentant libre et capable de tout, dans les faits et le fantasme de faire. Mais dès que sa vie redevient routinière, calme, paisible, on pourrait même dire de l'extérieur, équilibrée, l'angoisse s'empare de lui, pour le plonger dans un sentiment impuissant, éliminant ses ressources de créations, d'actions, sa volonté de partage, sa possibilité de vivre le présent avec les personnes importantes autour de lui. Il n'avait que fui, n'avait pu saisir que cette angoisse faisait partie de lui en la comblant par l'action, un désir de bouger, d'agir, de construire. Le présent, sa vie était devenu  une source remplie d'inquiétude de plus en plus profonde, perturbante, envahissante, paralysante, sans avoir conscience de la liaison inconsciente à son passé, son histoire, son vécu. La routine, le désir de construire une famille, d'avoir une profession qu'il apprécie, des amis, côtoyer les membres de sa famille ne pouvait être vécu sans cette lourde et pénible angoisse malgré une situation relationnelle plutôt calme et paisible en surface avec celle-ci. Sa seule possibilité était de vivre dans l'adrénaline, toujours projeté dans le futur, un futur inaccessible, déséquilibré parce qu'une fois atteint, le futur devient présent et le présent devient angoisse. C'était donc un sentiment difficile, voire impossible, rempli d'une dualité et d'un désir de se poser dans le présent. Son présent était assimilé à la peur d'être, une insatisfaction infinie, de ne pouvoir être, accepter de vivre son présent, d'avoir une certaine estime de soi, de pouvoir ne pas se sentir moins que rien, une impression de disparaître, de ne plus être. Quand sa vie devenait calme et routinière, la sensation, la conscience angoissante du sentiment du passé familial ressurgissaient à travers les déclencheurs du présent, sa vie présente, bien loin pourtant de ce qu'il avait vécu lors de son enfance et sans aucun rapport direct.
En effet, ses parents étaient très angoissés et le lui avaient transmis, malgré eux, à leur insu, n'étant même pas conscient de leur état et sans désir de faire du mal à leur enfant. L'inquiétude était permanente. L'atmosphère entre ses parents était tendue, fausse; trop différents de l'un de l'autre pour se comprendre ou s'écouter. Ils proposaient pourtant une image idéale du couple à leur enfant, comme s'ils étaient heureux. Non seulement ils ne l'étaient pas mais ils étaient malheureux, souffrant eux aussi. C'était une famille qui vivait essentiellement en autarcie malgré un père très sociable au contact des autres. Ils étaient au fond coupés de toutes réelles sociabilités, avec aucun partage authentique, seule l'image comptait, leur représentation. L'enfant ne pouvait sortir, il était surprotégé, étouffé. Ses parents lui avaient fait croire que le danger venait de l'extérieur et non de l'intérieur de la famille, ils y croyaient vraiment, ils en étaient eux-mêmes persuadés. L'angoisse était partout, la communication absente, parfois maternelle mais absente avec l'autre parent. Ce dernier avait le pouvoir, l'autorité de décider, d'interférer, d'interdire, de dire oui ou non.


Quand on prend conscience des éléments qui nous entourent, d'une angoisse, pas obligatoirement au moment ultimum de son expression, peu après qu'elle soit survenue, c'est le début de sa conscience qui amène à sa résilience après un certain travail thérapeutique.  Il faut pouvoir la percevoir, essayer de la ressentir à nouveau avec un oeil extérieur, une vision de l'enfant étant adulte, savoir où elle se situe, à travers quels évènements l'inconscient se déclenche et réactive ce sentiment émotionnel. Ces pensées, laissez-les vous envahir, reprenez conscience des moments qui s'y assimilent, laissez venir votre inconscient à votre conscience, sans analyse, simplement, sans chercher à savoir pourquoi. Ils peuvent être multiples, diverses, redécouvrez-les. Vous vous apercevrez que l'angoisse présente est assimilée à une autre angoisse passée, plus forte, d'abord plus floue, pas forcément précise au début mais qui le devient de plus en plus intense et précise à mesure qu'on prend conscience des diverses scènes reçues par l'enfant puis durant l'adolescence et enfin l'adulte que vous avez été. La menace présente paraît dérisoire, superflue et même fantasmagorique, irréelle car les véritables angoisses sont celles qui se cachent derrière celles du présent car elles ont été refoulées, peut-être analysées mais pas forcément en état véritable de conscience, en revivant les moments vécus passés angoissés, racontés dans chacun des détails, abordés de nouveau. Il y en a certainement plusieurs, de multiples situations anxiogènes, qui s'emboîtent à travers le temps, c'est la multiplication des événements de cette nature qui constitue à répétition et le temps le phénomène "Angoisse". Une situation, son existence par elle-même, à elle-seule, son unité n'est pourtant pas angoissante par son existence sauf s'il s'agit d'un événement à caractère traumatique mais la répétition des événements sensoriels similaires amène à l'apparition dans le temps de ce phénomène


Il est primordiale de comprendre dans un premier temps la description des symptômes de l'état d'angoisse mais hors crise d'angoisse intense. Lors d'une crise de panique, il est parfois très difficile de comprendre ce qui se passe à l'intérieur de soi. Il est plus simple de travailler à partir de "l'état d'angoisse", de ses déclencheurs. Puis, remonter à travers le temps, parcourir son chemin pour parvenir à sa genèse qui n'en a rarement une car c'est la multiplications et la répétition d'événements similaires qui favorisent le stress, l'anxiété pour devenir l'angoisse. On parlera donc d'étude de son cheminement. Chaque point est important, il est fréquent qu'il n'y ait pas d'origine mais un chemin allant de la petite enfance au présent. Il ne s'agit pas d'analyser mais de regarder, décrire les scènes, les détails, les sensations, les émotions de chacun de ses moments.


Devenu adulte, l'objet de l'angoisse n'est qu'un prétexte lorsqu'elle puise son cheminement dans l'enfance. Vous constaterez d'ailleurs que si l'objet n'est plus là, l'objet qui a provoqué cette angoisse sera rapidement remplacé par un autre. Ce n'est pas l'objet en lui-même qui la provoque mais le transfert à cet objet, à savoir, quelle angoisse se cache derrière celle qui se présente. Le point commun est entre-autre la sensation. L'esprit est parfois surprenant, ils dissocient lorsque l'inconscient devient conscient et les évènement autrefois angoissant sont totalement gérer et rentrent peu à peu dans des émotions justes et proportionnées. L'association involontaire produite par le refoulement, sa prise de conscience permet la dissociation pour se ré-associer de manière différente, dans une perception appaisée. Dissocier n'est pas si simple, un certain travail thérapeutique est nécessaire pour y parvenir. Il ne s'agit pas juste de voir, mais aussi de se donner le temps d'évoluer, de se reconditionner tel notre désir. D'ailleurs, que ce soit pour le plaisir ou la souffrance, le phénomène est similaire. La différence est que ce travail est nécessaire pour dénouer la souffrance. Peu de gens cherchent à comprendre leurs plaisirs, ils s'en accommodent tels qu'ils se présentent à eux et pourquoi pas !